Hiver 2011. Une adolescente rousse de 18ans, tout ébouriffée, se retrouve en plein hiver à Paris. Pour tout vêtement elle porte un short, un tee-shirt et des espadrilles. «Je n’avais plus une fringue, plus un rond», se souvient Angélique Eggenschwiler, qui rentrait d’un voyage en auto-stop en Afrique et en solo, entrepris sur un coup de tête «parce qu’on y parlait français». Qui aurait pu prédire que cette jeune femme aux mille vies, qui a été serveuse, palefrenière, vendeuse ou encore étudiante, aurait un parcours fulgurant à La Liberté?
A 28ans, «Angélique» est, avec Alex, un des deux seuls membres de l’équipe du journal à être connue uniquement par son prénom. Elle peut compter sur un bon fan-club. «Il arrive que des gens m’arrêtent dans la rue», lâche-t-elle, un peu mal à l’aise car elle se dit timide et anxieuse.
Vraie qualité d’écoute
Quand on la rencontre, on sent tout de suite la chroniqueuse. Angélique Eggenschwiler sait mettre à l’aise et écoute vraiment, l’œil attentif, souriant fréquemment pour encourager son interlocuteur. Ce n’est pas un hasard si elle cite, comme principale qualité, sa gentillesse.
Tout a commencé un peu par hasard pour elle. La Broyarde cherchait «une occasion de s’intégrer» à La Liberté et est devenue chroniqueuse lors de la création de la rubrique «Le mot de la fin», en 2016. Son premier texte porte sur la célèbre série américaine Top Model. «J’ai grandi en partie avec mes grands-parents. A 18h15, ma grand-mère s’installait devant cette émission alors que mon grand-papa, dans les parages, faisait semblant de ne pas regarder», se souvient-elle. A ce moment-là, la jeune femme étudiait l’anthropologie sociale et la science des religions à l’Université de Fribourg.
Toujours aux aguets, Angélique a l’art de capter les petits riens du quotidien et de les décrire de manière savoureuse. «J’ai toujours un petit carnet dans lequel je griffonne des idées. Mais il y a beaucoup de sujets dans lesquels je ne m’aventure pas, comme la politique ou l’actualité internationale, car je n’en ai pas l’expertise.»
«Nous essayons d’amener un peu de légèreté dans les dernières pages de La Liberté.»
Angélique Eggenschwiler
Privilégiant le travail à domicile, qui lui permet d’écrire une cigarette à la main et son chat sur les genoux, Angélique Eggenschwiler vit à Cornaux (NE) avec son petit ami, qu’elle a rencontré à une édition du festival Festicheyres. Il l’avait abordée en la complimentant sur son chien. «C’était celui de ma grand-mère, que je gardais ce jour-là», rit-elle. La jeune femme dispose aussi d’un vaste bureau à la rédaction centrale, à Fribourg, proche de celui de Pascal Bertschy, qui gère la Der depuis sa création et s’occupe également quotidiennement de la rubrique «Sortie des artistes». Et ce dernier de décrire sa collègue: «Angélique, c’est du Metallica chanté par Laura Ingalls ou parfois La petite maison dans la prairie joué par Metallica. C’est ce qui rend sa musique si originale, si aisément identifiable.»
Ode à la légèreté
Les horaires sont flexibles. La Broyarde écrit souvent ses chroniques le matin, ce qui peut prendre quelques heures à quelques jours selon l’inspiration. «Je fais beaucoup de recherches pour essayer de restituer une ambiance. Par exemple, si je parle de mécanique, j’essaie d’avoir le bon vocabulaire.» L’après-midi, elle alimente la rubrique qu’elle a récemment créée dans la Der: «Le lecteur en liberté». Elle soutient également Pascal Bertschy à l’édition des textes des autres chroniqueurs, qui font cela à côté de leur travail et qu’Angélique Eggenschwiler voit rarement. Les contacts se font plutôt par téléphone ou par mail. «Une ligne s’est créée dans la Der. Il y a l’idée d’être assez direct et d’éviter le vocabulaire trop érudit. Nous essayons d’amener un peu de légèreté dans les dernières pages de La Liberté.»
Quand on la lit, on a parfois l’impression qu’elle a déjà une cinquantaine d’années. Elle explique que cela vient peut-être de son enfance dans la campagne broyarde, où le temps était comme suspendu. Concernant sa passion pour la lecture et l’écriture, elle ne sait pas d’où elle la tire. Sa mère est aide-soignante et ses deux sœurs, Mathilda et Juliane, ne partagent pas forcément cette fibre de chroniqueuse. «Mon grand-père Louis Duc prenait souvent la plume pour rédiger des discours politiques, mais nous n’en avons jamais discuté», assure-t-elle.